Mots grammaticaux
Le pronom « ON »
Pronom indéfini ? ou pronom personnel ?
Il y a trois « on ».
Tous les francophones le savent, et les utilisent dans leur usage familier, surtout oral.
Les non-francophones qui s’intéressent au français et à son usage familier s’en inquiètent parfois, et s’interrogent souvent.
Les grammaires et les dictionnaires n’en parlent pas, ou restent très vagues à ce sujet.
Les trois ON sont des pronoms strictement « personnels » : comme JE et TU, ils ne représentent que des personnes humaines.
Ils ont une même syntaxe : sujets d’un verbe à la 3e personne du singulier. Mais leur attribut peut être pluriel, et varier en genre.
a) ON pronom indéfini. On a volé notre voiture ! » – « On dit que l’essence va augmenter ». Représente très vaguement « des gens, les gens », à l’exclusion de celui qui parle.…
b) ON pronom de 2e personne. (aimable, caressant, « hypocoristique ») : Alors, on est en panne ? » – « Eh ! bien, on n'est pas bavarde ce matin ? » – Signifie « tu, vous ».
c) ON pronom de 1e personne du pluriel. « Hier, on est rentrés tard » – « On n’était jamais allés (allées ?) en Italie, mais demain, on prend l’avion pour Rome » – Signifie « nous » (masc. ou fém.).
Dialogue
Je souhaiterais connaitre l’accord du participe passé utilisé avec le pronom personnel on : « on est arriv(é e és) en retard »
Le pronom « on », dont l’usage actuel fait un synonyme de « nous », a une syntaxe qui intimide nos dictionnaires...
Le silence de beaucoup de grammaires et dictionnaires sur cet emploi, aujourd’hui banal, est éblouissant.
La distinction entre ces trois pronoms est affaire de SITUATION : qui parle ? à qui parle-t-il (ou : -elle) ? En situation, deux des emplois peuvent se rencontrer dans un même contexte : » On (a) nous a dit qu’on (c) était en retard ».
La notion de « personne » (qui parle ou à qui on parle) existe dans les formes pronominales ou adjectives suivantes :
a) pronom personnel conjoint, sujet d’un verbe :
JE – TU – NOUS – VOUS
b) pronom personnel conjoint, objet d’un verbe :
ME – TE – NOUS – VOUS
c) pronom personnel disjoint (autres emplois) :
MOI – TOI – NOUS – VOUS
d) le pronom possessif
MIEN(S), MIENNE(S) – TIEN(S), TIENNE(S) – NÔTRE(S) – VÔTRE(S)
e) l’adjectif possessif :
MON, MA, MES – TON, TA, TES – NOTRE, NOS – VOTRE, VOS
NOTE 1 : Le pronom ON n’a pas de formes disjointes ni de possessifs. Suivant les situations, il emprunte les formes correspondantes de la 1e p. du pluriel, ou de la 3e personne du singulier.
NOTE 2 : Les formes dites « de 3e personne » peuvent représenter d’autres noms que les noms de personnes (animaux, objets, abstractions…).
Un mot–piège : TOUT
Bonjour, j’ai des difficultés pour reconnaitre « tout ». Avec quoi, pourrais-je le remplacer pour savoir si il est adverbe, adjectif ou pronom ? Pourquoi dois-je le placer en fin d'une phrase simple à la fin de la phrase Ex : je les donne tous. Et au temps composés, entre l’auxilliaire et le verbe pp. Je les ai tous donnés. Ce tous ici qu'est-il ? Merci de votre explication.
C'est la forme masc. plur. du pronom « tout, toute... ». Fonction dans ces énoncés : « attribut du complément d’objet « les ».
Comme il ne fait pas partie des 13 mots conjoints, alors que « les » en fait partie (Voir ci-dessous...), il ne peut être placé entre le sujet (« je ») et le verbe ou le groupe verbal.
Bonjour, sur le modèle : « les toutes premières fractions de seconde de l’Univers » dois-je écrire : les tous premiers instants de l’Univers ? ou les tout premiers instants ? je penche pour le second, mais sans comprendre pourquoi au féminin, cela s’accorderait et pas au pluriel... merci de bien vouloir m’aider.
Question prudente ! – Non ! Dites et écrivez : « les tout premiers instants... ».
Le pronom-adjectif-adverbe TOUT est un monstre, et votre dictionnaire doit vous y orienter.
Dans son emploi d’adverbe, où il devrait être invariable (donc « tout »), il s’obstine à varier en genre (féminins) – mais avec un masculin, il est invariable (en nombre).
Donc « le tout premier, les tout premiers – la toute première, les toutes premières ».
Mais... devant voyelle : la tout (ou : toute) ultime...
Contradiction entre l’usage oral et la grammaire de l’écrit. Les grammairiens y perdent leur latin !
Et la négation ? Explétive ?
J’ai cherché attentivement, en premier lieu, une réponse sur votre site, après consultation de mes propres ouvrages de référence. N’ayant pas trouvé satisfaction, je me permets de vous questionner ici... Voilà, ma question concerne l’adverbe de négation « ne ». Faut-il ou ne faut-il pas l'utiliser dans une phrase telle que : « Je voudrais le voir avant qu’il (ne) parte. » ? Merci.
La réponse n’était pas à demander à notre site, car elle concerne UN MOT (orthographe lexicale), et ORTHONET ne peut pas traiter tout le lexique. – Il s’agit de la préposition « avant », dans la locution adverbiale « avant que » ... Exige-t-elle une négation ? Pouvait-on ou devait-on écrire : « ...avant qu'il parte » ? – Votre dictionnaire doit vous dire que, dans cet emploi, la négation « ne » est facultative (et « explétive » : elle ne nie pas.
Ainsi le TLF – dans l’article AVANT (avec plusieurs exemples) :
« Avant que suivi d'un verbe au subj. (précédé ou non de « ne » explétif)]
a) Sans « en » explétif : [...] La question avait jailli de moi en flèche, avant que je songeasse à la retenir.
b) Avec « ne » explétif : [...] Dieu était dans l’île avant que N’y débarquât le prêtre, mais comme le feu dans les rameaux avant que le sauvage NE les frotte. »
Bien distinguer entre ORTHOGRAPHE SYNTAXIQUE et ORTHOGRAPHE LEXICALE ! (pour savoir où il faut chercher).
Des prépositions rivales
Depuis le plus ancien français, deux prépositions, « à » et « en », se disputent l’expression de réalités banales. Ainsi les moyens de déplacement.
Pendant des siècles, il n’y eut guère que deux façons de gagner un lieu éloigné, de prendre la route ou les chemins : « à pied », surtout ; « à cheval », pour quelques-uns.
Ces deux prépositions s’emploient bien sans article, ce qui donne au nom qui suit un sens général (on ne s’interroge pas sur « le pied » – lequel ? – ni sur le cheval – le vôtre ? ou un cheval de louage ?) – . « à » exprime, de la façon la plus générale, le moyen d’une action. Mais son rival, « en », va l’emporter quand le moyen de déplacement est un véhicule dans lequel le voyageur prend place (et même se met à l’abri des intempéries).
Les « deux roues » ne nous mettent pas à l’abri ? On devrait donc se déplacer « à bicyclette, à vélo, à moto »... ? – et même... « à trottinette » ? – L’usage résiste : c’est « en » qu'il préfère !
Avec « en », on va de plus en plus loin ; les étapes du marcheur, et même celles du cavalier n’étaient que de quelques lieues ; on s’est mis à voyager de plus en plus loin, « en calèche, en carrosse, en diligence, en voiture, en bateau, en chemin de fer, en avion... », et les distances ne se traduisent plus en journées, mais en heures.
Dans l’expression des moyens de vaincre la distance, « en » a éliminé « à ».
Prépositions et toponymes
Pourquoi dit-on : « à Malte », mais « en Sicile » ? Pourquoi « au Texas, au Maroc », mais : « en Louisiane, en Tunisie » ? Et faut-il dire : « en Guadeloupe » ? ou : « à la Guadeloupe » ? Quelle est la règle ?
Bonne occasion d’insister sur la différence entre une « règle » et un « usage » !
Mais soyons d’abord utile, en la donnant, cette fameuse règle ! Car dans la plupart des grammaires ou des dictionnaires, elle est incomplète, inexacte, ou tout simplement absente.
1. Deux sortes de toponymes !
Employés comme sujet ou objet, deux classes lexicales, suivant qu’ils ont ou n’ont pas l’article :
A. AVEC ARTICLE : les continents, des pays, provinces, régions, etc. Ces noms ont un genre.
masculins : l’Iran, l’Ouganda, le Maroc, le Québec, le Luxembourg, les Pays-Bas, l’Artois…
féminins : l’Espagne, la Pologne, la Sicile, les Antilles, l’Auvergne, la Jamaïque…
B. SANS ARTICLE : surtout villes et villages, des îles, quelques pays ; genre souvent incertain.
Londres, Orly, Avignon, Québec, Luxembourg ; Corfou, Ouessant… ; Madagascar, Cuba, Ceylan, Taiwan.
Cas particulier : villes et villages ayant un article qui fait partie du nom propre (et qui est porteur d’un genre) : Le Caire, Le Havre, Le Mans, La Ferté, Les Aubrais, Les Loges…
2. Quand ces toponymes sont employés comme compléments de lieu, ceux du groupe B s’emploient avec la préposition à, et sans article. Il faut y joindre, du groupe A, avec article + à (donc au), les masculins dont le nom commence par une consonne.
À Londres, à Québec, à Ouessant ; au Québec, au Poitou, au Mans, au Caire, aux Aubrais…
La vieille préposition en a gardé le reste, mais sans article : en France, en Amérique, en Iran, en Savoie, en Île-de-France, en Crète…
3. Tel est l’usage qui s’est établi en français moderne, après bien des variations (au 18e siècle, on hésite encore entre « en Chine » et « à la Chine »). On peut donc parler aujourd’hui d’une règle, puisque ce qui s’en écarte serait qualifié de « faute » (à part des coquetteries comme l’inévitable et naïf pédantisme « en Avignon »). Règle souvent mal formulée par des grammairiens, égarés dans des subtilités sur les dimensions des îles, mais négligeant l’élément décisif : la présence ou l’absence d'un article.
4. Des toponymes récents obéissent mal à la « règle ». Israël, dont le nom n’est devenu un toponyme qu’au 20e siècle, ne reçoit pas d’article, et reste dans le en. Ceylan, devenu le Sri-Lanka, remplace son à par au ; un usage récent impose « en Haïti » contre le traditionnel « à Haïti ».
Les noms des départements français, créés sous la Révolution pour faire oublier les vieilles provinces, n’obéissent que rarement à la « règle » ; les flottements sont nombreux, et défient tout inventaire sérieux. La troisième préposition, née en moyen français, vient concurrencer les deux anciennes. Le Rhône, fleuve, donne son nom à un département ; mais on n’habite ni en Rhône, ni au Rhône, mais « dans le Rhône » ; en Côte d’Or, oui, mais dans les Côtes-du-Nord. Encore beaucoup d’appellations y sont-elles flottantes. Qu’on ne s’étonne pas si DOM et TOM jouent sur nos trois prépositions. L’apparition récente des 22 « régions » ne simplifie pas les choses ! Que signifie : « en PACA » ? Et : « dans le Centre » ? Le visiteur est désorienté !
(du Québec) J’aimerais savoir pourquoi dit-on EN France, mais AU Maroc, EN Allemagne mais AU Pérou ?
Vous dites : « au Québec », mais : « en Gaspésie ».
Mais ne confondons pas règles (de grammaire) et usages (du lexique) ! Que la Crète ait, en français, un article que notre langue refuse à Corfou, c’est un fait de lexique, un usage. Que la première « prenne » la préposition en, et l’autre la préposition à, c’est un usage qui est devenu une règle.
Mots conjoints et mots disjoints
Les treize mots conjoints
Le maniement de ces treize mots, leur rôle et leur ordre dans des énoncés assertifs, interrogatifs ou impératifs, avec ou sans négation, créent de réelles difficultés aux enseignants et aux auteurs d’ouvrages pédagogiques de « français langue étrangère ». Ce sont surtout nos correspondants de l’étranger qui auront intérêt à lire et à copier cette page.
ne me te se nous vous le la les lui leur en y
1. ne
2. me te se nous vous
3. le la les
4. lui leur
5. en y
sont les seules formes qui peuvent (hors ponctuation ou parenthèse) s’intercaler entre le sujet et le verbe, donc à l’intérieur du groupe verbal.
Ce sont des formes conjointes.
Ailleurs dans le texte, elles deviennent des formes disjointes, et dans ce cas certaines changent de forme : les pronoms me, te, se, le, la, les deviennent moi, toi, soi, lui, elle, elles, eux.
Trois ne sont jamais disjointes : la négation ne, les pronoms-adverbes en, y.
Exemples de pronoms conjoints et disjoints :
Mon frère M’écrit souvent. Il correspond souvent avec MOI.
Pierre ? Je LUI écris souvent. Je corresponds souvent avec LUI.
Marie ? Je LUI écris souvent. Je corresponds souvent avec ELLE.
Les Dupont ? Je LES connais. Je corresponds souvent avec EUX.
A. Énoncé déclaratif (ou assertif)
Pronom conjoint unique
(1) 2 Pierre (ne) nous connait (pas) ; il (ne) nous écrira (pas)
(1) 3 Pierre (ne) les connait (pas)
(1) 4 Pierre (ne) leur écrira (pas)
(1) 5 Pierre (n’) en parlera (pas)
Séquences – ordre
Quand le groupe verbal inclut plusieurs formes conjointes, leur ordre est strict :
1. ne (adverbe)
2. me te se nous vous (pronoms, obj. dir.ou indir.)
3. le la les (pronoms, objet direct).
4. lui, leur (pronoms, objet indirect).
5. en, y (pronoms-adverbes)
Séquences incompatibles
Les formes d’une même ligne sont incompatibles. (me vous – la les – leur lui, etc. sont exclus)
2 et 4 sont incompatibles. (te les, – les leur sont possibles ; te leur est exclu)
Si 3 est représenté, 2 est objet indirect.
Séquences possibles
(1) 2 3 ils (ne) me les enverront (pas)
(1) 2 5 vous (ne) m’en donnerez (pas)
(1) 2 3 5 ils (ne) me les y enverront (pas)
(1) 3 4 tu (ne) le lui diras (pas)
(1) 3 5 tu (ne) m’y verras (pas)
(1) 4 5 vous (ne) lui en donnerez (pas)
B. Énoncé interrogatif
Les mots conjoints restent antéposés au verbe ; le pronom sujet est postposé (avec trait d’union).
(1) 2 3 (ne) me les enverront-ils (pas) ?
(1) 2 5 (ne) m’en donnerez-vous (pas) ?
(1) 2 3 5 (ne) me les y enverront-ils pas) ?
(1) 3 4 (ne) le lui diras-tu (pas) ?
(1) 3 5 (ne) m’y verras-tu (pas) ?
(1) 4 5 (ne) lui en donnerez-vous (pas) ?
C. Énoncé impératif (ou jussif)
(1) 2 3 envoyez-les moi (?)– ne me les envoyez pas
(1) 2 5 donnez-m’en – ne m’en donnez pas
(1) 3 4 dis-le-lui – ne le lui dis pas
(1) 3 5 (exclu) – ne m’y rejoins pas
(1) 4 5 donnez-lui-en – ne lui en donnez pas
NOTE :
a) m’y et t’y, possibles dans le groupe verbal, sont exclus de l’usage en fin de groupe postposé ; dans cette position, nous-y, vous-y sont possibles, mais rares. Exemples : Tu nous y attendras. Attends-nous-y (rare) – Tu m’y attendras. – (*Attends-m’y : exclu). – Tu t’y fies ? (*fie-ty ! exclu).
b) les formes conjointes postposées sont reliées au verbe et entre elles par des traits d’union.