Dialogues

La découverte des verbes

Dialogues

Bonsoir ! J’ai lu cette phrase dans un document à mon travail : « les difficultés qu’a rencontrées le service ». Cette phrase me choque ! Je connais la règle de l’accord du participe passé, avec l'auxiliaire avoir, avec le COD quand il est placé avant ! Mais là, j'ai une certitude qu’il faut écrire « rencontré », mais je ne sais l’expliquer, le justifier. Ai-je raison ? Merci de votre réponse !

Non, votre « certitude » était trompeuse (cela peut nous arriver parfois… ! Dans des moments de vertige... qui donnent naissance à des « règles »... fantômes). Il fallait accorder, tranquillement, avec le pronom relatif  « que », COD, qui précède le participe en question.

(« ...que le service a rencontrées » – OU : ...qu’a rencontrées le service » – (équivalents !).

Est-ce que le verbe avoir est bien conjugué dans la phrase suivante : « suite aux informations que je t'ai transmises hier, ... »

Votre texte n’est pas une « phrase ». Votre verbe « avoir » n’est « conjugué » ni bien ni mal. Il est auxiliaire dans le passé composé du verbe « transmettre ».

JE VEUX METTRE UNE PANCARTE SUR LA PORTE DE MON MAGASIN PORTANT LA PHRASE SUIVANTE : « LAISSER LA PORTE FERMEE S.V.P » laisser, dois-je l’écrire à l’infinitif (laisser) ou plutôt mettre un EZ à la fin (laissez). Merci

« mettre un –ez »... Cela porte un nom... Employez cette appellation... !

CONJUGUER…

Ce verbe, né en moyen français, est un emprunt au latin des Romains, qui pouvaient l’appliquer à leurs verbes, aussi bien qu’aux animaux que l’on unissait pour en faire un attelage. En moyen français, il est très tôt utilisé par plusieurs sciences ou techniques, pour des sens figurés, non grammaticaux. Mais dans ses emplois grammaticaux, il doit être appliqué uniquement aux formes verbales dont les grappes peuplent les tableaux des verbes. Donc ne « conjuguez » ni les noms, ni les adjectifs !

Une visite guidée des conjugaisons

Bonne occasion d’une rapide visite des « conjugaisons » qui peuplent nos grammaires… et nos dictionnaires modernes ; des tableaux très étudiés, très condensés… et qui résument les indications qui, à leur place alphabétique, énumèrent les emplois du verbe en question (les temps simples : présent, imparfait, passé simple, futur…), les temps composés : passé composé, futur antérieur, plus-que-parfait), etc., les modes (indicatif, subjonctif, conditionnel).

Ainsi, dans les verbes à leur place dans l’ordre alphabétique, vous lisez : « v.t. » = verbe transitif – « v.i. » = verbe intransitif –. (voir la liste des abréviations, propre à chaque dictionnaire). L’article consacré à un verbe comporte un chiffre qui correspond à un paragraphe à la fin du dictionnaire, concernant un ou plusieurs verbes ayant les mêmes particularités.

Les tableaux de conjugaisons présentent, dans ces cases différentes, toutes les « formes simples » du verbe, et généralement ses formes composées, avec auxiliaire. Ainsi, pour conduire, le présent de l’indicatif sera représenté par les 6 formes (de : je conduis à : ils conduisent), la « conjugaison ») de ce temps. Son impératif, par ses 3 formes : conduis, conduisons, conduisez. Ce sont des conjugaisons.

Puis, des cases du tableau présentent des formes non conjuguées (donc sans pronoms sujets : je, tu, … ils) ; des formes dites « nominales » : infinitif présent : conduire – participe présent : conduisant – participe passé : conduit, -ite.

À noter – ce qui est souvent omis ou négligé, que le participe présent a un sens actif (se dit de celui qui « conduit »), alors que le participe passé est passif (se dit de ce ou de celui qui « est conduit ») ; il ne prend un sens actif et ne se dit de celui qui conduit qu’avec l’auxiliaire « avoir ».

Les groupes

Nos premières grammaires françaises, s’inspirant des manuels du latin, classaient les verbes en 4 « conjugaisons ». L’enseignement actuel, inspiré par une morphologie de difficulté progressive, les distribue en 3 « groupes » :

1er groupe : verbes « réguliers », infinitif en –er.

2e groupe : verbes « réguliers », infinitif en –ir, participe en –issant.

3e groupe : tous les autres verbes.

Le principe (pédagogique) est que les 2 premiers groupes ont des conjugaisons uniformes, sans exceptions, alors que le 3e groupe, moins nombreux et peu ouvert à la néologie, recueille les infirmes exclus des deux premières, et qui devront être étudiés un à un, ou par petits groupes. Mais l’enseignement de l’orthographe a vite imposé quelques assouplissements.

1er groupe

Des infinitifs comme jouer, prier, suer, parler, coller, donner, passer… ont, dans toute leur conjugaison, les mêmes désinences. Mais deux échecs, dans cette uniformité, sont causés par les deux « consonnes maudites », C et G. Dans tout verbe en –er, comme l’honnête donner, les infinitifs se terminant par une de ces deux consonnes, comme commencer et changer, ont besoin d’une retouche dans des formes comme commença, commençant, commençons, changea, changeant, changeons… Alors, devait-on les condamner à rejoindre tous les irréguliers, coupables, rebelles, anarchistes du 3e groupe… ? On préféra, en haut lieu, les admettre comme repentis dans l’immense, honnête et envahissant 1er groupe. Et les enseignants, dociles, font retentir ces « exceptions » dans leur plaidoyer pour l’orthographe de nos verbes ; non sans rappeler, entre collègues, que l’anglais a hérité de la même peste. . .

Normes et usages

Histoire de la norme  - La langue nationale

Le français est, constitutionnellement, « la langue nationale » de la République. La seule ! L’Académie française, institution nationale, qui a survécu aux épisodes et aux drames des derniers siècles, en est la responsable et l’arbitre. La Constitution reconnait et protège l’existence de « langues régionales », mais sans les énumérer ni mentionner leurs droits.

Historique

En 1549, une ordonnance de François 1er, dite « de Villers-Cotterêts », décide que les actes officiels (jugements, décrets, ordonnances, contrats, testaments, etc.) doivent être rédigés en français.

La langue de la capitale devenait ainsi, en principe du moins, langue du royaume ; en fait, pendant plus d’un siècle, l’usage du français, langue de la capitale, fut loin de se répandre dans l’ensemble du royaume; sa moitié sud, de Bordeaux à Toulon et Briançon, parlait des variantes de la langue d’oc ; quant à la « langue d’oïl », ses variantes dialectales ne rendaient pas toujours aisé, sur les marchés de la capitale, le dialogue entre acheteuses parisiennes et paysannes venues de Normandie ou de Picardie.

La bourgeoise qui veut servir à ses invités une oie rôtie se voit proposer une « oue », qu’elle achète ; et la rue où prospérait la vente de ces oiseaux devint « la Rue aux Oues » (orthographiée aujourd’hui « ...aux Ours », depuis un 17e siècle où le peuple parisien « amuissait » tous les R en fin de mot ; ce qui subsiste pour les infinitifs en -er, mais non pour les autres).

Même si Molière force un peu le trait, écoutez les paysans de son Don Juan !

Naissance d’une académie

C’est en 1635 que le cardinal de Richelieu, premier ministre du jeune Louis XIII (14 ans), agissant au nom du souverain et avec son consentement, décide de créer une « académie » comme celle qui, dans une Italie sans unité réelle, veut donner à cette illustre nation une langue qui, sur des bases toscanes, tentera d’unifier les idiomes de ses provinces.

Et les 40 « académiciens », nommés par le premier ministre, puis leurs successeurs, élus, vont s’atteler à une rude besogne : à l’image des excellents dictionnaires du latin classique ou du latin de l’Eglise, donner au royaume de Louis XIII un répertoire du lexique… parisien – ou du bon usage de la capitale. Alors qu’à l’époque plus de la moitié du royaume – à part quelques membres de la noblesse, du haut clergé ou des sciences – ne parlait que des dialectes régionaux, qui n’avaient ni dictionnaires, ni grammaires, et qui ne s’imprimaient guère…

Il a fallu quatre siècles pour que l’« Hexagone » entier, et non seulement les écoliers, adopte la langue nationale ; des drames historiques (1914-1918 fut le pire) ont hâté l’unification linguistique du pays, aidés enfin par l’école de la République.

Elle a fourni au royaume son premier dictionnaire (1694), en a rédigé les éditions suivantes (surtout la 3e (1730) et la 5e (1830), mettant ainsi à jour l’essentiel du lexique en usage.

Mais deux tentatives d’une « grammaire de l’Académie française » ont échoué, et si l’autorité académique, en l’espèce, n’est pas contestée, elle ne s’exprime que sur demande, rarement, et discrètement ; la France a abandonné cette discipline aux éditeurs spécialisés et aux auteurs reconnus par les autorités et par les enseignants.

Et ailleurs ?

La langue française est pratiquée dans de nombreux autres pays, et plusieurs nations en ont fait une « langue nationale », ou même « la langue nationale » – soit pour l’ensemble de leur Etat, soit pour une partie délimitée de leur territoire.

Dans ces deux situations, l’Etat a tous les droits et toutes les responsabilités que comporte une « langue nationale ». C’est ainsi que nos voisins belges ont une Académie royale de langue et de littérature françaises, dont il appartient au pouvoir politique de déterminer le rôle et les responsabilités.

Dans des régions du globe éloignées de l’Europe, le climat et le terrain créent des réalités et des modes de vie qui exigent un langage et surtout un vocabulaire spécifiques, utilisés par l’usage quotidien, par l’information et par l’école, et enseignés à l’école ; donc un dictionnaire « national » – et peut-être une « grammaire nationale » …

Norme ou usage ? Des grammaires saisonnières ?

Un Québécois, naguère, interpella Orthonet sur la norme des conjugaisons dans ses corvées quotidiennes : « Ici, avec nos hivers de plusieurs mois, pour sortir la voiture du garage, je dois d’abord – la moitié de l’année, six mois durant… « pelleter » la neige qui bloque le chemin. Moi, une demi-heure durant, je pelte, je pelte… je dois pelter… » et vous, en France, vous diriez (comme vos dictionnaires) je pellète ? – Et un voisin ajouta : « Dans nos grandes surfaces, aux saisons des cadeaux, le personnel doit étiqueter quantité d’articles… et, pour gagner du temps, on n’étiquette pas, on éticte… – Notre langage se ressent du climat. »

Alors Orthonet a compris pourquoi nos dictionnaires du français d’Europe, dans leurs exemples des verbes, multiplient les contextes à l’infinitif : « pelleter la neige – étiqueter des colis… » - et évitent de les conjuguer… - C’est pourquoi nos grammaires, décrivant et enseignant l’usage, ont un remarquable chapitre (…supranational) sur les « verbes en eler/-eter », quittes à imaginer des contextes de cauchemar ; et c’est pourquoi les artisans qui pratiquent encore quelques techniques de jadis ne citent leurs savoirs qu’à l’infinitif ou aux participes : « Parquetterez-vous ? » – Rassurez-vous ! Je vais vous parqueter vos pièces ». – Quant aux verbes d’anciennes pratiques (ébiseler, parqueter, rabonir, emboiser, escarper, essanger…), très nombreux jadis, la plupart ont discrètement quitté nos dictionnaires… modernes.

Ayant quitté l’usage, victimes des techniques, ils ne sont plus cités dans nos dictionnaires.

Dialogue… incomplet, mais suggestif.

Pourriez vous me dire comment je peux faire la distinction entre le verbe entendre et le verbe écouter?

REPONSE. Vous auriez pu poser la question à notre lexique, ou à votre dictionnaire, ou au TLF, ou à un moteur de recherche… et nous proposer ensuite VOTRE réponse… Cet effort aurait ouvert un vrai dialogue, profitable pour vos raisonnements et vos connaissances ; « écouter » est une action volontaire (et « orientée ») du sujet, « entendre » est une sensation que le sujet subit, ou qu’il peut avoir provoquée.

REMARQUE. Ignorance ? plutôt indifférence ! L’auteur de la question attend une réponse, sans avoir fait le moindre effort pour essayer une réponse, un début de réponse, et soumettre à Orthonet cet essai.

Il était facile de comparer, pour ces deux verbes, les définitions sommaires de notre Lexique, ou celles de son dictionnaire, ou d’un site quelconque, ou (les meilleures !) celles du TLF (consultation gratuite sur internet), puis de proposer un essai de réponse personnelle. Et ce serait un vrai dialogue, qui resterait dans la mémoire active du questionneur.

C’est ainsi qu’il est profitable de dialoguer !

Je désirerais savoir si le verbe instructionner existe afin de mettre fin a un petit dileme, merci d'avance cordialement

D’ABORD, CORRIGEZ : « dilemme » – (ne faites plus cette faute!)… et consultez votre dictionnaire avant de poser cette question.

« instructionner » figure-t-il dans un dictionnaire ? (TLF, par exemple) ? » - Non ? Alors ne vous chargez pas (et ne nous chargez pas) de son admission dans l’USAGE.

Dans certains livres de grammaire, on fait l’accord du participe passé avec le pronom sujet « on » (ex : on est allés) et dans d’autres livres, on ne le fait pas (ex : on était venu - Grammaire en contexte Hachette). Quelle est la règle exacte ?

Il ne s’agit pas d'une « règle ». Vous avez une collection de « règles » ? Combien ?

C’est un pronom qui est en train (depuis 1900 surtout) de changer de sens dans l'usage.

Après des siècles où, dès l’ancien frs, il était réellement « indéfini », représentant tout être humain (sexe et âge indéfinis), il commence à évoquer celui ou celle (ceux ou celles) dont il est question, sans qu’on puisse ni qu’on veuille préciser et dire son nom ou leurs noms... Au 20e siècle, un usage populaire en fait un synonyme discret de « nous », mais sans lui en accorder la syntaxe : le verbe qui suit est toujours à la 3e personne du singulier, mais l’attribut est généralement au pluriel : « On était parties en avance, et on est arrivées avant nos maris ».

Dialogues…

Pourquoi met-on un S à poids, à temps, à puits, à corps...

QUESTION NAÏVE ! On ne le « met » pas, puisqu’il y est depuis les origines de notre langue, qu’on le prononçait et qu’on l’écrivait dès l’ancien français : « li cors, li tens... », etc.

Une petite question : Dans le nom commun haut-parleurs, parleur est-il un nom ou un adjectif ? Comment les distinguer dans ces cas ? Merci de me répondre.

QUESTION MALADROITE ! Dans ce nom composé, traduction (1884) de l’anglais loud-speaker, « parleur » est un nom, mais « haut » est un adverbe invariable. D’où le pluriel des haut-parleurs (tous les dictionnaires, dont celui de l’Académie… et le vôtre, que vous oubliez de consulter).

Pourriez méclairer sur lutilisation du verbe convenir : « En espérant que vous obtiendrez le poste qui vous convient... » ou bien « En espérant que vous obtiendrez le poste qui vous convienne ... » ?

QUESTION MAL POSEE ! Elle ne concerne pas « l’utilisation du verbe convenir », mais un choix (grammatical et stylistique) entre indicatif, conditionnel et subjonctif.

Réponse : choisissez :

LE POSTE qui vous « convient, conviendra »…

ou :

UN POSTE qui vous « convienne » (ou « conviendrait »)

Dialogue et variante

Ecrit-on elle s'est rendu compte ou elle s'est rendue compte ?

Réfléchissez : « se » signifie-t-il « soi » ? ou : « à soi » ?

VARIANTE : Dois-je écrire : je me suis rendu compte ? ou : rendue compte ?

« me » signifie-t-il « moi » ? ou : « à moi » ?

« moi » signifierait que la malheureuse s’est transformée… en compte ! Absurde !

Donc me est indirect : « à moi » !

Norme et prononciation

Nos dictionnaires obéissent-ils à une définition totalitaire (sens, orthographe, prononciation) de la NORME LEXICALE ?

Au début, pas du tout ! Quand le cardinal de Richelieu, agissant au nom du souverain, crée une « académie française » et lui assigne, comme première tâche, la rédaction d’un dictionnaire (il prévoyait, ensuite, celle d’une « grammaire »…) ; son but était que le français devînt la langue de tout le royaume, alors que des régions entières parlaient d’autres idiomes (à commencer par la langue ou les langues d’oc, et leurs variantes).

Il fallait, pour ne point se bercer d’illusions, inventorier le BON USAGE de la capitale (et de quelques régions... bien-disantes, comme le Val de Loire), et les doter des instruments documentaires (dictionnaire, grammaire, etc.) jusqu’alors réservés au latin.

Il fallait imiter le voisin italien, qui avait confié à l’Accademia della Crusca (née en 1583), la tâche de faire du toscan une langue littéraire pour l’Italie.

Mais le cardinal (1585-1642) ne survécut guère à sa courageuse décision, et le dictionnaire qui, en 1694, fut présenté à Louis XIV était loin d’en réaliser le projet.

La 9e édition du dictionnaire de l’Académie a terminé la lettre P. Pour la suite de l’ordre alphabétique, il faut donc se reporter à la 8e édition (1925), à d’autres sources (dont le TLF), ou aux dictionnaires du commerce, qui anticipent (prudemment...) sur la norme officielle.

Et la prononciation ?

Nos mots peuvent-ils servir et circuler sous leur seule forme graphique (leur « orthographe ») ?? Et leur forme orale ? Leur PRONONCIATION ? Ne compte-t-elle pas ?

C’est certes le sort de quelques néologismes, surtout techniques ou scientifiques, utilisés dans des publications de ces disciplines, mais qui finissent par apparaitre dans l’information générale (presse, radio, télé…). Ce sont souvent des mots étrangers, que soudain la presse se met à citer et à répéter – en fonction d’un fait d’actualité (tsunami), ou d’un usage venu d’ailleurs (golf, wagon, week-end, sandwich…) - Et si cette actualité s’installe dans la durée, le retour fréquent du mot lui donne une présence à la télévision… où il faut lui affecter une prononciation. L’année suivante, certains dictionnaires lui accordent une « entrée » … et parfois une prononciation. Et un néologisme, plus souvent consulté que ses voisins d’âges vénérables, a besoin d’une forme orale.

Le dictionnaire de l’Académie, dans sa première édition, décidait de la forme écrite des mots, en tenant compte d’abord d’une tradition – qui date souvent du moyen français – sans mentionner la prononciation… celle du bon usage de la capitale ; les provinces, plus ou moins lointaines, peuvent avoir des prononciations régionales, voire dialectales, dont la mention aurait compromis la cohésion du projet académique.

L’Académie est plus attentive à la langue littéraire – donc écrite – qu’aux bavardages du « grand public », et reste régulièrement muette sur la forme orale de ses entrées. Mais cette image graphique, isolée, hors contexte, correspond-elle à une prononciation réelle dans la communication réelle ? C’est un peu l’animal du musée zoologique, immobilisé dans une simulation de mouvement et de vie.

D’autre part, la forme écrite du mot est un choix parmi les formes qu’il peut prendre dans l’usage (…ou les usages). Or, pendant le demi-siècle qu’a duré la rédaction du premier dictionnaire, l’usage oral des Parisiens a connu bien des aventures. La seule consonne R, en fin de mot, devenait muette dans les finales en –er, -ir, -oir… ce qui modifiait presque tous les infinitifs ; mutation aussitôt combattue par le « bon usage » (les amies de Trissotin !), mais dont les traces sont visibles dans l’usage actuel.

La prononciation des « mots », dans des situations et des contextes réels, évolue sans cesse ; aucune génération ne fait les mêmes phrases et ne prononce leurs mots comme la génération précédente. Il suffira d’observer les films populaires des années d’après 14-18 (quatre années de brassage des hommes de toutes les régions par les armées) pour mesurer les mutations de la communication orale.

L’observation scientifique des faits de prononciation est récente ; il y a plus d’un siècle qu’a commencé l’enregistrement et l’analyse acoustiques de la parole, ensuite l’observation par la radiographie, puis la radiocinématographie des organes de la parole.

C’est après 1914-18 que le cinéma commença à créer des archives de la parole humaine, et des langues qui en sont des produits.

Dans ses éditions successives, le dictionnaire académique modernisa quelques graphies en les rapprochant de la prononciation en usage. Ainsi sa 3e édition (1740) remplace des S devenus muets dans le « bon usage » de la capitale par des circonflexes ; feste, coste deviennent fête, côte…, alors que geste, poste, faste conservent leur consonne dans la graphie... et dans l'usage oral.

Et nos dictionnaires ?

Littré fut un des premiers à mentionner la prononciation des entrées. Mais comment représenter nos quelque 59 phonèmes avec notre pauvre alphabet latin d’une vingtaine d’unités, malgré leurs accessoires multiples, malgré le secours des « signes diacritiques » (accents, cédilles, trémas, etc.).

Et il tenait compte de la syllabation. Alors il écrivait : « célébration (sé-lé-bra-sion ; en poésie, de cinq syllabes). Et le lecteur interprétait... ou négligeait.

Les mots venus de langues étrangères exigeaient des choix et des approximations (Littré écrivant, hardiment : « geyser (ghey'-sèr), s. m. Terme de géologie... L’usage (français) opta au contraire pour un G initial « spirant » (celui de geste). C’est la prononciation actuelle de ce vocable venu d’Islande et entré dans notre usage lexical, tant graphique que phonétique.

Quant à la recherche d’un « bon usage », tenant lieu de norme pour la prononciation actuelle des unités lexicales, nous citerons deux ouvrages importants :

a) le Dictionnaire de la prononciation française dans sa norme actuelle (1987), de Léon Warnant, linguiste belge ; prononciation d’un vocabulaire important, et de plusieurs centaines de noms propres.

b) André Martinet, Henriette Walter – Dictionnaire de la prononciation française dans son usage réel. 1973. – Importante recherche expérimentale, rendant compte de la prononciation spontanée de plusieurs milliers de mots par une quinzaine de témoins francophones, très cultivés, vivant à Paris. Cette expérience scientifique distingue clairement entre les mots ne créant pas de variantes, et les mots (dont notre geyser) provoquant des réponses diverses des témoins.

c) En outre : plusieurs dictionnaires récents, dont le Petit Robert, donnent en A.P.I. la prononciation usuelle (considérée comme « normale ») de toutes les entrées.

L’A.P.I.

Récente, la solution des meilleurs dictionnaires fut courageuse, mais c’est la solution de l’avenir : habituer les lecteurs à lire la prononciation de toutes les entrées en « A.P.I. : alphabet phonétique international ».

NOTE. Le T.L.F., dont la matière concerne le « français moderne », de 1789 au 20e siècle, ne mentionne pas la prononciation des mots et son histoire dans l’article lui-même, mais parfois la notice linguistique qui suit les articles les plus importants fournit quelques étapes des formes orales du mot traité.

Dialogues

UN DIALOGUE DIFFICILE

Qui a raison ? Le correspondant ? Ou Orthonet ?

...Voici la phrase qui me pose un problème. « Personne d’autre que toi et tes proches collaborateurs ne souhaite la démission de M. Durand. » J’avais écrit « souhaitent » parce que les deux sujets sont coordonnés par « et ». J'ai visité beaucoup de sites, mais je n’ai pas pu trouver la réponse.

ERREUR ! – ACCORD avec le pronom « personne » donc singulier : « ne souhaite ».

Dans le texte d’une petite chansonnette, j’utilise cette phrase « chaque semaine le mardi nombreux on se retrouvent » (il serait plus correct de dire nous nous retrouvons mais pour la rime l'autre version convient mieux). Ma question : doit-on mettre « ent » à retrouve ?

« mettre ‘ent’.... Langage enfantin ! Vous pourriez écrire plutôt : « doit-on écrire le verbe retrouvent au pluriel ? »

Doit-on écrire lorsqu’il s’agit d’une femme : vous vous étiez VUE décerner le titre prestigieux de ...

NON. C'est compliqué !

« vu » si c’est à elle qu’on l’a décerné (SE = à soi) – (la presse en abuse!)

« vue » si c’est elle qui l’a décerné (SE = soi) – (rarement utilisé)

Situation embrouillée, cause de nombreuses confusions... ; les dictionnaires s'y perdent !

Comment accorder exclure dans la phrase : la réglementation n'exclut pas

Modèle d’ignorance (de négligence) ! « ACCORDER » cette forme verbale, c’est la mettre en « accord » avec son sujet, et puisque celui-ci est un nom au singulier, la mettre à une 3personne du singulier. Quant au temps et au mode, la conjugaison vous propose une série de 3e pers. sing. (simples ou composées) dont seul le SENS peut guider votre choix.

Le mot « important » s’accorde-t-il avec les mots précédents dans la phrase suivante : « ...cette famille avait des besoins alimentaires important(s). » ?

Ce « mot » n’est-il pas un ADJECTIF ? ça ne s’accorde pas, les adjectifs ?

Bonjour, Je voudrais savoir si la phrase suivante demande un conditionnel présent ou un présent de l’indicatif pour le verbe « se briser ».

« L’air frais s’engouffrait dans ses vêtements de campagnard, mais il demeurait aussi sensible qu’un récif sur lequel se brisent (-raient) des vagues déchainées. » Merci.

Elle ne « demande » rien. Elle attend votre choix (de sens !) Parlez-vous d'un récif réel...(brisent) ? ou imaginaire (briseraient) ?

Pouvez-vous me donner la difference essentielle entre : Fierté, Orgueil et Vanité.

La QUESTION est bonne...

À quel(s) dictionnaire(s) pouviez-vous demander des définitions et des exemples « essentiels » de ces trois noms ?

Auquel des 3 NOMS (car vous ne notez même pas que ces 3 mots sont des NOMS) conviendrait la définition suivante : « Souci de sa dignité, respect de soi-même » ? Conviendrait-elle aussi ou mieux à l’un des deux autres ?

Peut-on accepter le subjonctif après « espérer » (usage ?). Exemple : « Tout le monde espérait qu'il tienne le coup » au lieu de « ... tiendrait le coup ».

Dans une question de ce type, le meilleur recours est un rapide coup d’œil dans le T.L.F. (sur internet). Dans l’article « espérer », un paragraphe traite de « espérer que... » suivi d’une subordonnée. Sept exemples, à divers temps de l’indicatif. Si les linguistes qui ont écrit cet article avaient trouvé, dans les 10 777 citations contenant ce verbe, un exemple de subordonnée au subjonctif, ils l’auraient cité (probablement en « Remarque »). Ce n’est pas le cas. Donc, réponse négative : le subjonctif n’est pas admis dans la subordonnée introduite par « espérer ».

« Espérer » n'est pas « souhaiter » !

REMARQUE. Tout autre dictionnaire aurait pu répondre à cette question. Mais dans des arbitrages concernant la syntaxe du « bon usage », y compris les audaces des meilleurs écrivains, le TLF est l'autorité la plus sûre.

Un groupe de professionnels issu ou issus ??? du milieu

CHOISISSEZ ! Les deux sont corrects.

Dans les archives d’Orthonet

Des dialogues… souriants ? ou… bizarres ?

Quelle est la différence entre papier et feuille merci

Votre dictionnaire donne-t-il la même définition pour ces deux noms ? Orthonet accepte votre « merci » pour ce conseil : « Avant de poser cette question, il fallait consulter un dictionnaire » – (le vôtre, ou un de ceux du site, ou des sites)

REMARQUE. Tous les jours, le même refus du « dépannage » quand un peu de réflexion et une plongée dans le plus modeste dictionnaire doit suffire, ou au moins rendre la « question » mieux motivée.

Si Orthonet devait répondre à TOUTES les questions, non pas par des « oui » ou des « non », mais par de vraies mises au point… il lui faudrait un personnel de rêve, en nombre, en qualité, en compétence… et même en imagination ! Ce n’est que par des séries de REFUS motivés que nous ne recevons plus – ou presque plus – de questions sur : « je vous serais… ou saurais gré – et grée, ça s’accorde ? », qui furent légion !

Ni sur le pluriel d’ « euro » !

Je voudrais que vous me disiez si l’on peut dire (français académique) « sur du long terme » ou bien si l’on est obligé de dire « sur LE long terme ». Merci infiniment !

Même le style académique laisse le choix entre « sur [le, un, du...] long terme. Notre préférence : « un long terme », le plus concret.

DANS SES FABLES, LAFONTAINE FAISAIT-IL DES FAUTES D’ORTHOGRAPHE ?

Dans quelques Nouvelles Fables, publiées par le fabuliste peu avant son décès, on lisait les vers suivants :

Autrefois un logis plein de Chiens & de Chats,

Par cent Arrêts rendus en forme solemnelle

Vit terminer tous leurs débats.

Le Maître aïant reglé leurs emplois, leurs Repas,

Et menacé du foüet quiconque auroit querelle,

Ces animaux vivoient entr’eux comme cousins...

VOYEZ-VOUS UNE OU PLUSIEURS FAUTES DANS CES VERS ? ...

La MESSAGERIE ayant attendu en vain vos réponses, voici notre solution (par rapport à l’édition de 1694 du Dictionnaire)

solemnelle, reglé, foÛet, auroit, vivoient

sont les formes du Dictionnaire de l’Académie 1694.

aïant est incorrect (pour "ayant") –

Brefs rappels

1) N’écrivez jamais « t’il – t’elle – t’on ».

2) Les participes passés fait et laissé employés comme semi-auxiliaires (suivis d’un infinitif), sont invariables.

« Elle s’est fait remplacer par une amie » – « Nous nous sommes laissé convaincre. »

3) Les formes d’impératif terminées par une voyelle (va, donne, pense, profite, offre, cueille…), se prononcent et s’écrivent avec un –s final quand elles sont immédiatement suivies d’un des pronoms-adverbes « en » et « y », et dans ce cas seulement.

« profites-en, donnes-en, penses-y, offres-en, cueilles-y, vas-y », etc..

4) 1,98 million. Qui a dit que le pluriel commence à 2 ?